Jamais sans mon corps
Quelle prodigieuse machine qu’est le corps humain! Quel phénomène! On peut comprendre la réflexion du grand philosophe Martin Heidegger qui concevait l’homme comme le «poème commencé de l’univers». Avez-vous déjà réfléchi à cette merveille que vous êtes? J’aimerais vous partager ce qui me fascine le plus dans le corps humain.
Le corps, poème de l’univers!
L’approche purement biologique du phénomène corporel m’a toujours fasciné et a même souvent été l’objet des plus belles méditations de ma vie. Cela commence toujours par un sentiment d’émerveillement devant l’infinie complexité que je suis. Le résultat de 600 millions d’années d’évolution. Je possède une structure fonctionnelle de 40 mille milliards de cellules constituant la peau, les muscles, les nerfs, les organes, le squelette, etc. Et toutes ces cellules sont organisées, sauf accident, selon un ordre aussi étonnant qu’immuable, ce qui donne comme résultat que le corps, qu’il soit beau ou laid, a toujours un nez, une bouche, deux oreilles, deux bras et deux jambes toujours à la bonne place, grâce à la prodigieuse organisation secrète qu’est l’ADN. Celle-ci apparaît encore plus complexe que l’univers constitué des centaines de milliards d’étoiles dispersées dans des milliards de galaxies, elles-mêmes perdues dans une immensité silencieuse, vide et glacée. Or, cette merveilleuse complexité qui dépasse l’imagination serait programmée, selon les savants biologistes, pour nous permettre de vivre jusqu’à cent vingt ans d’une vie pleine et entière.
Comment se fait-il que nous ne nous rendions pas jusque-là ? Je vais peut-être vous étonner en disant qu’on prend généralement conscience de son corps quand il ne fonctionne pas très bien. Quand il se loge un grain de sable dans l’une de ses fonctions. Normalement, le corps devrait opérer dans une parfaite harmonie, comme l’a écrit le célèbre docteur Alexis Carrel pour qui « le corps bien portant vit silencieusement. Nous ne l’entendons pas, nous ne le sentons pas fonctionner. L’harmonie des fonctions organiques donne le sentiment de la paix. Quand la présence d’un organe atteint le seuil de la conscience, cet organe commence à mal fonctionner. La douleur est un signal d’alarme. » Nous sommes alors en émoi et nous nous questionnons sur ce qui ne va pas.
La conquête de la conscience
Ma méditation sur le corps ne s’arrête pas à la dimension purement physique, car la grandeur du corps c’est aussi son cerveau, lieu de toute la vie mentale. Une machine prodigieuse dont l’évolution s’étale sur des milliards d’années. Le nombre de connexions dans un cerveau humain serait supérieur au nombre d’atomes dans l’univers.
On comprend pourquoi Carl Jung, dans sa pratique, était émerveillé par ce qu’il appelait la « conquête de la conscience » qui fut « le fruit le plus précieux de l’Arbre de Vie, l’arme magique qui conféra à l’homme sa victoire sur la terre et qui lui permettra une victoire encore plus grande sur lui-même à l’avenir. » Ce cerveau qui nous place au cœur de l’univers par la prise de conscience qu’il permet de la réalité.
On sait que la conscience est la caractéristique la plus spécifique de l’espèce humaine, c’est-à-dire celle qui, comme l’affirme Albert Jacquard, « sait que demain sera ». Celle qui sait aussi que demain elle ne sera plus. Je pense ici à cette phrase d’André Malraux : « L’homme est né lorsque pour la première fois, devant un cadavre, il a chuchoté : Pourquoi? » C’est la raison pour laquelle nous nous intéressons tellement à la relation dynamique qui existe entre le cerveau et l’esprit ou l’intelligence, par laquelle l’homme se distingue de l’animal.
(À suivre)
Jean-Paul Simard
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