L’ANTIDOTE IMMORTEL
En commençant à rédiger cet article, je me suis posé la question suivante : quel serait le message le plus urgent à communiquer aujourd’hui? Qu’est-ce qui pourrait soulager l’angoisse qui accable le monde depuis plus d’un an? À bien y penser, j’en arrive à la conclusion que le plus important serait de partager quelques informations sur l’anatomie du principe vital qui anime le corps physique que nous croyons être.
On dit souvent que les sages ne s’affligent ni sur les vivants ni sur les morts. Mis en face de la rapidité avec laquelle les mortels quittent ce monde, les sages demeurent sereins et ne se lamentent pas. Savent-ils quelque chose que nous ignorons, un secret qui nous serait caché? Les grands personnages éveillés que j’ai eu l’opportunité de rencontrer au cours de mes voyages m’ont tous enseigné une même réalité : l’enveloppe charnelle que nous nommons « notre corps » n’est pas notre véritable identité. Nous sommes différents du corps. Nous sommes également différents du corps subtil que nous appelons « notre mental ». Alors, qui sommes-nous?
D’après les sciences noétiques ainsi que l’ensemble des connaissances holistiques, notre vraie position constitutionnelle dans l’espace est une particule d’esprit, non une particule de matière. En tant qu’atome infinitésimal d’esprit, nous n’avons jamais été créés et nous ne connaîtrons jamais un état de non-création. Nous existons, voilà tout, car dans la nature rien ne se crée et rien ne meurt, tout se transforme. Les anciens textes des académies védiques précisent que jamais ne fut le temps où nous n’existions et jamais aucun de nous ne cessera d’être. Ce qui se passe à l’instant du phénomène naturel que nous nommons la mort est en réalité un simple changement de dimension. Le principe vital qui nous anime accepte un nouveau corps, aussi naturellement qu’il est passé de l’embryon à l’enfance, puis à l’âge adulte et enfin à la vieillesse dans le précédent. Cette pseudo mort ne trouble donc aucunement les êtres éveillés qui ont conscience de leur nature d’esprit. Ils ne peuvent donc pas être manipulés par la peur.
Chaque individu est un principe vital distinct de tous les autres. À chaque seconde, nous changeons de corps et nous nous manifestons sous la forme d’un enfant, puis d’un adolescent, d’un adulte puis d’un vieillard. À travers toutes ces mutations cellulaires, le principe vital reste identique à lui-même et ne subit aucun changement de structure fondamentale. Parvenu à l’instant de la mort du corps constitué d’énergie matérielle, le principe vital spirituel le quitte pour en revêtir un nouveau, matériel ou spirituel, pour une nouvelle existence. Vue sous cet angle, la mort présente donc l’avantage d’échanger un ancien véhicule de chair devenu obsolète contre un neuf rempli d’un renouveau d’énergie.
Nos joies et nos souffrances varient avec nos différents corps, car elles sont le simple résultat de la manière dont nous avons antérieurement conçu l’existence. Nous sommes le pilote de nos destinées et nous possédons la capacité de gagner dans une vie prochaine un corps spirituel, ou du moins un corps matériel doté de qualités supérieures grâce auxquelles nous aurons la possibilité de connaître des joies physiques encore plus grandes. Dans l’un ou l’autre cas, il n’y a nulle raison de se lamenter sur le phénomène de la mort.
Voilà donc pourquoi les sages ne se troublent pas devant l’annonce de la mort. Ils connaissent parfaitement la nature du principe vital individuel et savent qu’il fait partie d’un Principe Vital Infini. Quel que soit le nom donné par les traditions religieuses à ce Principe Infini, qui est une source de vie immortelle, ne change rien à l’affaire, car cette transmigration d’un corps à un autre se produit de toute façon, que nous soyons croyant ou athée, et cela quelles que puissent être nos empreintes confessionnelles ou nos convictions intellectuelles. La métempsychose dépasse toute notion de science empirique ou de religion institutionnalisée.
Le principe vital qui survit à la dissolution du corps physique ne peut être divisé. Le concept de l’unité des âmes, tel que certaines écoles philosophiques le présente, semble donc n’être qu’une superstition. L’âme humaine fait partie intégrante et inaliénable de la Totalité universelle, et si cette Totalité pouvait être partagée en une multitude d’âmes individuelles, elle serait alors divisible et mutable. Or, la Totalité divine ne peut être sujette à une telle division.
Ce qui peut nous apporter un certain soulagement face à la mort imminente des corps physiques est de savoir que ce qui pénètre le corps tout entier ne peut jamais être anéanti. Aucun virus, aucun vaccin, aucun poison ni aucune arme biologique, chimique ou nucléaire ne peut détruire le principe vital impérissable. Chacun peut ressentir intuitivement que ce qui éveille le corps de toutes parts est la conscience. Les physiciens eux-mêmes sont désormais arrivés à la conclusion définitive que ce n’est pas des atomes de matière mais des étincelles de conscience lumineuse qui déterminent le comportement des particules élémentaires de la matière.
Le but réel de toute science n’est pas de tirer quelque profit financier éphémère, mais de libérer la conscience de la croyance matérielle qui l’emprisonne; tel est aussi le but de toute pratique de yoga ou d’ascèse spirituelle authentique. Le principe vital que nous incarnons est indestructible, éternel et sans mesure; seuls les corps physiques qu’il emprunte sont sujets à la destruction. Ce principe de Vie ne peut être tué. Il n’est pas détruit quand la maladie, la vieillesse ou les armes anéantissent le corps. L’âme-esprit que nous sommes ne connaît ni la naissance ni la mort. Non-née, immortelle, originelle, elle n’eut jamais de commencement et jamais n’aura de fin. Elle ne meurt pas avec le corps. Dans les versets du célèbre traité védique de la Bhagavad-Gita, la transmigration est comparée au fait de se défaire de vêtements usés pour en revêtir de neufs. C’est en fait une bonne affaire.
(Suite et fin du texte au prochain numéro)
Patrick Bernard
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