Les jeux de cartes du destin

Serait-il possible de sauter les étapes de l’évolution de la conscience humaine? Les textes révélés nous apprennent qu’il y a des sujets confidentiels qui ne peuvent être saisis qu’après s’être élevés par certaines pratiques yogiques, celles du bhakti-yoga en particulier. Les hautes relations d’amour de la Transcendance ne s’adressent qu’aux âmes qui ont déjà conscience de la présence d’un Souverain primordial, le Maître-Un de tout ce qui est. Il faut bien commencer par le commencement. Nous allons donc discourir ici sur un sujet plus terre-à-terre et qui nous concerne tous : le destin.

Si un jour nous pressentons que nous existons dans la matière et simultanément au-delà de la matière, je me demande si, du même coup, nous ne pourrions pas avoir l’intuition qu’il puisse exister également des univers d’antimatière, distincts de notre univers matériel, des mondes hyperconscients d’où proviendraient les lois immuables qui régissent les destinées de tous nos projets ainsi que les conditions que la vie nous impose. Les Anciens enseignaient que ce qui nous a été destiné par l’arrangement supérieur issu de tels mondes d’antimatière ne saurait être défait en aucun lieu ou par qui que ce soit, humain, extrahumain, archange ou démon. Si cette règle s’applique comme une réalité providentielle en ce qui nous concerne, elle devrait s’appliquer également pour tous les êtres de la Terre et bien au-delà de l’espace.

La science védique du Vedanta nous apprend qu’une source unique, suprêmement consciente et vivante, se multiplie en d’innombrables manifestations autant personnelles qu’impersonnelles. Elle dirige de cette manière tout ce qui existe sous forme d’émanations de fréquences vibratoires par la transformation de ses énergies. Son action se fait sentir à travers une multitude de traditions et de cultures, soit par diverses apparitions d’une même Personnification Suprême et Divine (le monothéisme de Bhagavan), soit par une grande variété d’activations de puissances transformationnelles (un phénomène surnaturel appelé parashaktivada en sanscrit). Ce niveau de variété spirituelle est révélé même dans le monde matériel lorsqu’y apparaît l’Être originel sous une forme minérale, végétale, animale ou humaine, car l’Être unique accroît son bonheur en se dédoublant à l’infini et de manière incommensurable.

Selon les Védas, quels que soient les projets que nous prévoyons ou que nous tentons de réaliser, une force providentielle qui n’a rien à voir avec le pur hasard a d’ores et déjà décidé ce qui doit arriver. Peu importe la manière dont nous nous organisons, nul plan n’aboutira s’il n’est en adéquation parfaite avec les fréquences transformationnelles qui portent en elles l’approbation de la conscience des mondes d’antimatière.

Nous sommes libres de concevoir divers desseins, mais à moins qu’ils ne soient actualisés par l’entremise ou l’intercession d’un programme préétabli, jamais ils ne se réaliseront. Toutes sortes d’êtres vivants échafaudent des millions de plans sur Terre et dans l’univers, mais sans l’approbation du Tout Vivant (The Organic Whole), sans le « oui » permissif et complaisant du Grand Tétragramme, le Dieu de la Bible hébraïque (YHWH), « l’Être qui fait être tout ce qui est » partout et toujours, aucun de ces plans ne pourra connaître le succès. Inutile donc de perdre son temps, son enthousiasme et son argent avec des projets voués à l’effondrement (la collapsologie de la civilisation industrielle). La société matérialiste ferait donc bien de revoir sa copie de toute urgence…

Si on nous dit que tout ceci n’est que croyance et superstition, nul ne nous oblige à prendre cette opinion au sérieux. Ce genre de réflexion est le plus souvent fondé sur une idéologie de scepticisme maladif, d’absence chronique d’observation de la nature ou, au pire des cas, sur des préjugés sans valeur. En observant comment les choses se passent sur cette planète, on se rend compte rapidement que le fait de croire ou de ne pas croire en quelque chose revient au même.

La raison en est que croyance et non-croyance sont deux modes psychologiques qui se réclament d’un même parti pris, une réaction située au niveau du mental. Le mental émotif rejette et accepte sans arrêt, il ne représente donc pas un outil de connaissance très fiable. En réalité, les fréquences vibratoires qui déterminent les prédestinations existentielles ne se fondent pas sur des croyances ou des non-croyances, mais sur de simples expériences. Nous n’avons pas besoin d’y croire ou de ne pas y croire pour les vivre. Nous avons juste besoin d’une bonne dose de lucidité et de grâce. L’expérience intérieure est des millions de fois plus convaincante que l’expérience scientifique ou philosophique. En tant que réalité expérimentale en évolution, le feu sacré de la foi est une substance et non une croyance. C’est une force intérieure qui n’est pas de l’ordre du compris, mais du ressenti. Son élément n’est pas l’intellect humain limité, mais l’intelligence intuitive des profondeurs. Comme une fleur, elle peut s’étioler ou s’ouvrir.

Les destins sont comme des jeux de cartes qui nous sont distribués selon les réactions des actions faites au cours d’innombrables vies antérieures. Il n’y a pas d’injustice dans le cosmos. Tout est légitime, mesuré, quantifié et mérité avec la plus grande précision. Nous recevons les cartes correspondant exactement aux joies et aux peines qui nous ont été programmées, calculées d’après les cascades d’événements que nous avons générées dans nos vies passées, quand bien même nous aurions tout oublié. Nous détenons une certaine part de liberté. Notre libre arbitre est le reflet de l’héritage immortel de la liberté absolue de l’Être primordial dont nous sommes des particules atomiques de conscience intégrée, ni plus ni moins.

Même si ce libre arbitre est lui-même fortement conditionné par nos influences culturelles actuelles, il nous reste un certain pourcentage de liberté que nous pouvons activer. Ainsi, nous avons le pouvoir de décider de quelle manière nous allons utiliser le potentiel proposé par la distribution des cartes karmiques qui nous ont été allouées. Nous ne pouvons pas changer les cartes, mais nous avons la latitude de faire le meilleur usage d’un mauvais jeu d’incarnation et de chercher à rectifier la situation. Nous avons aussi tout le loisir de faire un très mauvais usage d’un excellent jeu et de tout gâcher. Ce que nous appelons « Dieu », faute de mieux (du mot grec Theos, en lien avec le Deus latin, et avec le Dies, la lumière, le jour de clarté) a établi l’ensemble des principes et des lois de la manifestation cosmique, y compris les lois du destin. Sa conscience est infaillible et il ne se trompe jamais; mais ce n’est pas Lui qui écrit notre destinée, c’est nous qui l’écrivons, et nous en sommes responsables à 100 %. Ce qui nous arrive n’est jamais la faute de Dieu. En vouloir au divin pour les épreuves que nous traversons serait une accusation basée sur un fond de connaissance très limité.

Il faut se rappeler que rien n’est fatal dans le temps éternel; toutefois, simplicité et patience sont requises, car notre vie actuelle n’est que le résultat, brillant, nul ou moyen, des actions de nos vies précédentes. Pareillement, notre vie présente est la préparation pour la suivante, et ainsi de suite dans le grand samsara. Les Anciens savaient tout ça. Selon eux, c’est nous qui avons le gros bout du bâton dans toute cette histoire. Nous détenons un immense pouvoir décisionnel, car nous pouvons prévoir notre destination future : où voudrais-je me rendre après la mort de mon corps, et quelles conditions d’existence voudrais-je expérimenter dans ma prochaine vie? Est-ce que je choisis de garder une forme humaine ou bien de redescendre vers l’animalité, ou même plus bas? Ou est-ce que je voudrais m’élever vers des conditions d’existence édéniques? Ou me libérer du cercle des morts et des renaissances, et ascensionner jusqu’aux mondes d’antimatière? Le catalogue des possibilités est infini. Une vie est la programmation du destin de la suivante. On peut donc prévoir et s’y préparer. Qui plus est, certaines initiations, telles que la prière, le service de dévotion, le chant des Saints Noms, l’écoute des vibrations sonores spirituelles, une vie vertueuse, le fait de suivre les enseignements d’un bon guide spirituel, et plein d’autres choses encore, ont la propriété quasi miraculeuse d’adoucir un destin.

Il n’y a dans les mondes d’antimatière aucune différence entre celui qui domine et celui qui est dominé, car leurs relations (leurs « rasas ») sont libres de toutes les imperfections de la vie matérielle, comme l’envie, l’exploitation, le trafic des personnes, la manipulation, la jalousie, l’orgueil, etc. Nul n’est supérieur ou inférieur dans les relations entre les êtres des mondes d’antimatière puisque dans l’éternité tout est d’égale valeur. Cependant, c’est loin d’être le cas sur Terre! Nos physiciens savent très bien que lorsque des éléments matériels opposés entrent en collision, ils s’entre-détruisent. Ceci se produit parce que le monde de matière est de nature destructive et mortelle. Tout est voué à la mort matérielle ici-bas. Ce phénomène naturel n’arrive jamais dans les mondes du noumène d’antimatière, car ces systèmes d’univers se situent au-delà de l’espace-temps linéaire et de la dualité.

Pour autant, il ne s’agit pas de mépriser nos corps de matière, de rejeter nos familles ou notre métier si nous en avons un. Loin de nous de telles idées saugrenues. Il semble que nous sommes au contraire appelés à inviter l’incorporel dans nos cœurs de chair et dans nos beaux projets d’entreprise. Le fait de prévoir en premier lieu les conditions karmiques dans lesquelles nous désirons renaître n’implique pas de négliger notre situation actuelle; en fait, c’est tout l’inverse. Dans ce monde de nature destructive où nous avons mérité de nous réincarner, si nous ne ressentons pas la main bienveillante de « l’Être qui fait être tout ce qui est », la présence inconcevable du Grand Attracteur divin KRSNA, nous ne pouvons alors que nous faire du souci et nous angoisser face à la mort qui tout dévore autour de nous. Notre avenir est alors sans avenir.

Par contre, si nous vivons notre vie avec le sentiment qu’une présence super subjective et ultra angélique accompagne le moindre de nos pas, nous pouvons alors nous décharger de toutes nos préoccupations en les déposant aux pieds de ce Gardien divin qui est en nous comme tout autour de nous. Quoi qu’il puisse arriver au cours de notre court passage sur Terre, si nous agissons dans un tel état de détachement et de lâcher-prise, tout est supposé se mettre en place selon un ordre supérieur, et sans même que nous ayons à lutter outre mesure pour l’existence. Ce qui doit arriver doit arriver et arrivera. Ce qui devait arriver est arrivé. Il n’y a pas d’erreur. Ne plus s’en faire en sachant que tout est déjà en place attire vers nous la bonne fortune. Le doute existentiel la fait fuir. Dans un sens comme dans l’autre, nous serons spirituellement guidés. En étant conscients des jeux de cartes du karma de chacun, nous serons « inspirés » de l’intérieur (Dadami bhudi yoga). Nous rapatrierons notre souveraineté triomphante. Et ce ne sera pas de la tiédeur ou de la superstition, loin de là.

Les Upanishads disent que de cette manière, il serait possible de vivre plus simplement sa vie, sans envier les positions d’autrui, en accueillant avec sagesse nos conditions actuelles, tout en préparant allègrement nos modalités à venir. Nous n’avons pas besoin de faire de grandes choses pour être heureux. Des choses simples faites en pleine conscience possèdent une grande puissance. Le seul fait de fermer une porte avec respect, de caresser un chat avec tendresse ou d’étudier des textes sacrés comme un service offert au maître du destin (la lectio divina), tous ces gestes pourtant si simples peuvent parfois suffire amplement à trouver la force de tolérer bien des situations irrespirables. Les plus grands mystiques de l’histoire humaine étaient souvent de simples tisserands ou des cordonniers. Tout dépend, bien sûr, de notre état d’esprit au moment où l’on agit. Tout se passe dans le mystère du cœur. Il est possible de vivre dans l’ici et maintenant, dans l’instant de grâce de la présence transcendante qui se réjouit en nous et qui observe nos motivations secrètes. Si cet art de vivre semble être du domaine de la religion, on doit alors intégrer le mot religion dans son étymologie grecque et latine qui est « religare », se relier en privé à soi et au Soi, un Cœur tourné vers l’infini de l’Être/Lumière.

Que nous y croyons ou non, le principe de l’Âme universelle nous accompagne au fond de notre cœur, tout au long de nos expériences prédestinées. Elle nous parle. J’en ai la certitude comme des millions de gens en ont aussi la certitude. C’est une boussole mystique qui ne nous fait jamais perdre le nord. C’est elle qui nous éveille, car nous ne sommes pas éveillés. « Se proclamer éveillé témoigne de notre manque d’éveil », note avec justesse le théologien philosophe Jean-Yves Leloup. Tout arrive comme il se doit, et pour notre ultime bénéfice, par la magie de la lumière intérieure.

Si aujourd’hui, au lieu de vivre dans les croyances restreintes et habituelles de notre petit réel quotidien, pleins d’inquiétudes par rapport à demain et plein de regrets par rapport à hier, nous étions soudain tout remplis de l’état d’âme que nous venons de décrire, je me demande si nous ne cheminerions pas plus rapidement, sans rien dire à personne, vers les mondes infinis de la plus Belle Réalité qui soit.

Patrick Bernard, 8 février 2025.

 

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