Recours collectif, solitude stratégique et un soupçon de paix retrouvée
Nous étions dix. Dix locataires de la rue, unis dans une mise en demeure adressée à notre propriétaire commun. Dix à dire : « Assez. » Dix à espérer une réponse. Mais il n’a pas répondu. Silence radio. Silence stratégique. Silence méprisant.
Depuis, j’ai multiplié les démarches. J’en ai parlé dans la chronique précédente, mais les choses avancent, même si elles avancent à contre-courant.
Le Tribunal du logement n’accepte pas les requêtes de groupe. Nous sommes donc obligés de faire des demandes individuelles. Une par une. Dossier par dossier. Énergie par énergie. Et ça change tout. Ça fragmente. Ça ralentit. Ça isole.
J’ai pris un rendez-vous à l’aide juridique pour déposer ma demande. Cinq semaines d’attente. Mais j’ai réussi. Et surtout, j’ai été confiée à une avocate spécialisée en droit du logement. Et là, j’ai été soulagée. Soulagée de ne pas avoir à chercher un avocat qui accepte l’aide juridique — parce que c’est une tâche ardue, épuisante, et souvent infructueuse.
Cette avocate a dit oui. Elle a accepté de me prendre, sachant que cela inclut plusieurs locataires désireux d’avoir un service de base. J’imagine qu’elle aura une stratégie. Peut-être ouvrir tous les dossiers. Peut-être regrouper les preuves. Peut-être créer un précédent.
Mais ça, ce sera pour la prochaine chronique. Pour l’instant, je veux vous parler de ce que j’ai tenté de faire pour nous. Pour les autres. Pour ceux qui disaient vouloir agir.
La réunion fantôme
J’ai organisé une rencontre. Quinze minutes. Juste quinze. Pour expliquer tout ce que j’avais fait jusqu’à ce jour. Pour avoir leur opinion. Pour décider ensemble quelque chose.
Personne n’est venu. Personne n’a avisé. Personne n’a demandé de nouvelles.
Sauf ma voisine. Elle est venue. Elle a tout un dossier. C’est le plus grave de la rue. Elle participe un peu. Elle est là. Et ensemble, on a décidé de faire le recours.
Mais les autres… silence. Cinq jours plus tard, un seul m’a demandé des nouvelles. J’ai été franche. Deux locataires ont préféré débarquer. Les autres n’ont rien répondu.
Et maintenant, la limite est claire : leur dossier doit être prêt avant que je rencontre l’avocate. Je suis certaine d’en recevoir très peu.
La charge invisible
Tout ça pour dire que je dois me taper toute ma comptabilité pour l’aide juridique. Et je n’aime pas faire ça. Ce n’est pas mon langage. Ce n’est pas ma joie. Mais je le fais. Parce que je veux un plombier. Parce que je veux des réparations. Parce que je veux du respect et une garantie de service.
Une locataire qui a débarqué fait faire ses réparations et les déduit de son loyer. Mais elle prend un risque énorme. Le propriétaire est filou. Il adore coincer les locataires qui ne le paient pas, même si c’est faux. Il manipule. Il joue et crée avec les failles du système. Il y a plusieurs insatisfaits sur le sujet. Mais peu veulent s’impliquer. Peu veulent documenter. Peu veulent s’exposer.
Et c’est là que ça devient lourd. Parce que préparer un dossier, c’est chiant. Surtout quand on n’a pas passé son temps à prendre des photos, à créer un album de preuves, à archiver chaque négligence.
Si ça avait été fait au fur et à mesure, ça aurait été plus simple aujourd’hui. Mais on ne vit pas en mode procès. On vit en mode survie. En mode adaptation. En mode «peut-être que ça va se régler. »
Attendre l’avocate, garder le cap
Alors j’attends. J’attends que l’avocate s’en mêle. Je ne veux pas faire n’importe quoi. Je ne veux pas improviser. Je veux que ce soit solide. Structuré. Défendable.
Et en attendant, je respire. Je me recentre. Je me rappelle pourquoi je fais tout ça.
Une paix retrouvée
Le logement très abîmé au-dessus de chez moi est libre. Enfin. Et j’ai retrouvé un peu de paix. Un peu d’espace. Un peu de silence.
Et ça fait du bien.
Ça ne règle pas tout. Mais ça allège. Ça apaise. Ça permet de reprendre des forces.
Agir même seule, bénir même fatiguée
Cette chronique n’est pas une plainte. C’est un témoignage. C’est une trace. C’est une offrande.
Je ne suis pas une militante professionnelle. Je suis une femme qui veut vivre en paix. Une mère qui veut protéger son espace. Une médium qui veut honorer la vérité.
Et même si je suis seule à porter certaines démarches, je sais que je ne suis pas seule dans l’intention. Je sais que d’autres regardent. Écoutent. Espèrent.
Alors je continue. Je documente. Je prépare. Je respire.
Et je vous dis : soyez bénis. Soyez lucides. Soyez courageux.
À suivre… Julie L.
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