Le défi du changement

En ce début d’année, le défi du changement s’est imposé à moi lors de la transition de 2019 à 2020. Changement technologique s’entend, car à bien d’autres niveaux, je me remets régulièrement en question intérieurement au contact du théâtre tridimensionnel. Sauf que j’ai souvent constaté que la technologie est un reflet éloquent de l’ordinateur humain. Mais n’oublions pas qui se trouve devant l’ordi!

Le premier ajustement auquel j’ai dû faire face a été le passage

Il aura fallu que mon technicien informatique me fasse comprendre qu’à partir de maintenant, Microsoft cessait de nourrir Windows 7 de ses mises à jour de sécurité pour que je me résigne à passer à la version 10, mouture qui ne me disait rien qui vaille après avoir lu sur ses désavantages. Mais du même coup, mon changement d’ordinateur me promettait un bond quantique en termes d’efficience, car le processeur hyper rapide ainsi que le disque dur de type SDD (sans pièces mécaniques mobiles) qui équipent ma nouvelle machine accroissent de beaucoup la vitesse et la fiabilité, un argument de taille pour l’adepte de réflexes que je suis. En guise d’exemple, alors que mon ex-HP ouvrait quasiment ligne par ligne mon fichier de photos, mon nouveau DELL affiche l’ensemble du dossier… en une seconde ! Le jour et la nuit.

Puis, comme je l’avais prévu, le changement de niveau a bouleversé plein de choses que je tenais pour acquis. À commencer par mon très cher clavier qui m’accompagne depuis 45 ans, alors que je m’apprivoisais à la méthode de dactylographie QUERTY sur la machine à écrire manuelle de ma mère. En effet, la dernière mise à jour de Windows 10 de l’automne dernier a malencontreusement « évacué » le bon vieux clavier Canada-Français auquel tant de Québécois sont habitués depuis toujours, et qui offre huit accents sur touches séparées. Tout avait disparu ! À force de fouiller la Toile, j’ai fini par trouver un forum où un petit fûté a trouvé la façon d’installer manuellement ledit clavier directement dans le DOS avec le programme Powershell de Windows. Quand je dis qu’Internet rend savant, Google avait fait de moi un programmeur… Une minute et je retrouvais mon clavier, dont l’absence empoisonne déjà plein de monde. Si je reprends l’analogie entre l’ordinateur et le corps humain, j’ai compris que le corps recèle tout ce qu’il faut pour installer/désinstaller des programmes.

Et il ne s’agit que d’un seul exemple des nombreux ajustements que j’ai dû faire pour adapter mon nouvel équipement à ma réalité. Belle illustration de tout ce que comporte le changement. Mais déjà, après quelques semaines, je me réjouis chaque fois que la machine réagit en quelques millisecondes à chacune de mes commandes. Avide de réflexes ultra vifs, le gardien de but en moi est comblé. Dans ce cas, comme ça se produit dans nos vies, le changement a permis de se départir d’une lourdeur et d’accroître l’efficacité.

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Le second changement majeur que je retardais touche l’omniprésent téléphone intelligent, dont je m’étais toujours volontiers passé et qui ne m’aurait été utile qu’en de rares occasions, notamment lors de séjours dans d’autres villes ou lorsque mon absence m’empêchait de prendre connaissance de mes courriels. Moi qui passe mes journées devant l’ordinateur et sur Internet, je prends congé de l’informatique chaque fois que je quitte mon domicile, transférant mes appels sur un classique flip pour être rejoint. D’autant plus qu’en constatant l’usage que font l’immense majorité des utilisateurs du cellulaires, je ne me retrouvais nullement dans l’addiction qu’il provoque visiblement.

Mais voilà, depuis le printemps, j’ai accepté de m’adonner à une activité de service social qui requiert l’usage du téléphone intelligent, tous les contacts et la transmission de données se faisant au moyen de textos. Comme pour Windows et ses enjeux de sécurité, je me voyais forcé de me doter de ce bidule. J’ai bien tenté de résister quelque temps avec des textos sur mon flip, mais… ouf! J’ai donc joint un peu malgré moi les rangs de tous ceux et celles pour qui ces micro-ordinateurs sont presque devenus le prolongement d’eux-mêmes. Et j’étais curieux de voir comment j’y réagirais… Certes, j’en apprécie les fonctionnalités dans le cadre de ce pourquoi je me le suis procuré, mais force est de constater que je ferme l’appareil lorsque je suis chez moi, comme je le faisais avec le flip. J’ai compris qu’il demeure un outil, et non un maître. Comme le mental doit l’être…

Depuis des années, j’observe avec intérêt l’influence que les téléphones intelligents ont sur les gens et la façon étonnante dont ils ont modifié leur comportement. Et je suis toujours un peu perplexe devant l’addiction qu’ils provoquent. Je me demande si tout le temps passé sur cet outil technologique n’est pas le reflet du temps qu’on ne passe pas à s’envoyer des textos intérieurs… J’ai l’impression que beaucoup de gens sont un peu perdus lorsqu’ils sont privés de contacts à l’extérieur d’eux-mêmes et que le silence se fait. J’en connais beaucoup pour qui le silence intérieur est hautement déconcertant, de sorte qu’ils cherchent constamment à le meubler de l’extérieur. Jamais dans cette vie je n’ai vu un outil illustrer autant ce phénomène. Surtout lorsqu’on constate à quel point il court-circuite les échanges oraux et stimule le « me, mysel(fie) and I ».

Pour ma part, tous ces moments de silence permettent un dialogue constant avec moi-même. Qui est ce « moi-même » ? Je n’en suis pas sûr, mais ce que je sais, c’est que ces échanges touchent prioritairement des enjeux profonds reliés à mon incarnation et au lien que j’entretiens avec le visible et l’invisible, aux défis que j’ai accepté de relever ici-bas. Les notions d’âme reviennent constamment dans ce dialogue intérieur, qui n’est possible que lorsque je suis seul, dans le silence. Quand j’écris dans mon bureau, j’ai à ma disposition toute la musique du monde ainsi qu’un système de son très performant. Mais je ne m’en sers qu’exceptionnellement, car tout ce qui vient troubler ce silence intérieur représente une entrave à ce que me souffle mon intuition.

La machine ne serait-elle addiction que lorsqu’elle se retrouve en terrain favorisant ? Comme dans cette célèbre citation du médecin, chimiste et pharmacien Antoine Béchamp : « Le microbe n’est rien, le terrain est tout »…

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