EN ROUTE VERS L’ILLIMITÉ

 Un projet de toute une vie !

On me proposa un jour d’écrire un texte sur le thème suivant : « Après toutes ces années de quête spirituelle, André, où en es-tu aujourd’hui ? » Réfléchissant sur ce que j’allais écrire, je tombai sur la conclusion d’un texte mémorable de Jean Gabin intitulé Maintenant je sais : « Il y a 60 coups qui ont sonné à l’horloge, je suis encore à ma fenêtre, je regarde et je m’interroge. Maintenant, je sais, je sais qu’on ne sait jamais… »

Avancer par en arrière…

En lisant ceci, je réalisai que ma vie se résumait effectivement en ces quelques mots. Tout au long de mon existence, j’ai voulu dire JE SAIS, mais plus je cherchais, moins je savais. Aujourd’hui, je n’ai certes pas cessé d’avancer, mais contrairement à autrefois, cela se fait la plupart du temps par des pas… en arrière.

Lors d’une de mes nombreuses périodes de remise en question, mon sage intérieur fit monter ceci à ma conscience : « Si tu as l’impression de ne plus avancer, c’est que tu as le nez collé sur l’écorce depuis belle lurette. Recule de trois pas et tu verras déjà apparaître dans ton champ de vision une partie de la forêt qui se cache derrière ton arbre, ton univers. »

Je réfléchis à cette phrase et me rendis compte que durant les cinq décennies, je m’étais obstiné à chercher la vérité, me fermant lentement aux autres, me rivant de plus en plus le nez sur l’écorce de MON arbre, celui de MA connaissance évidemment. Plus je tentais de pénétrer au coeur de mon arbre, plus je me disais : « Ça y est. Je sais, je sais. ». Mais, en opérant ce recul que me recommandait mon vieux sage intérieur, je découvris, non sans un certain effroi, je l’avoue, mais aussi avec un extraordinaire sentiment de libération et de bonheur, toute l’ampleur de la forêt qui se cachait derrière MON arbre, l’arbre de MA vérité.

Se dépouiller du savoir pour goûter à l’Être

Et, pour en remettre, ma petite voix intérieure renchérit : « Ne te limite pas à cette forêt car, au-delà de celle-ci, il y en a d’autres, beaucoup d’autres même. Élargis plutôt tes horizons au lieu de juger ce qui n’entre pas dans le cadre de tes normes. » C’est à ce moment que j’ai gravi la marche la plus haute de ma vie, celle de l’Esprit. Pour l’atteindre, j’ai dû par contre faire un grand sacrifice : déposer mon précieux sac de connaissances acquises à la sueur de mon front… que je traînais sur mon dos depuis des années, monter dessus, et accéder ainsi en toute légèreté, mais dépouillé de tout, à ce palier supérieur sur lequel le « savoir » n’était plus utile, même nuisible, et où l’« être » suffisait.

J’ai donc cessé de chercher à tout comprendre et j’ai commencé à ÊTRE à plein temps… Un cadeau empoisonné pour certains, mais une délivrance pour moi… J’ai dû, pour ce faire, jeter mes cahiers de notes, cesser de vouloir décortiquer l’inexplicable, cesser de vouloir à tout prix prouver mes points de vue aux sceptiques de ce monde, etc. Ne détenant plus la vérité, qu’avais-je désormais à prouver ?

Est-ce nous qui trouvons notre voie, ou est-ce elle qui nous trouve?

Puis, comme tout arrive à point à qui sait attendre, la vie m’a donné l’occasion de me rendre en Inde huit fois plutôt qu’une… en trois ans, pour trouver ma nouvelle voie – je dirais plutôt pour que celle-ci me trouve. C’est sur le sol de cette planète étrange que j’ai écrit ma première chanson thérapeutique Te rends-tu compte combien il t’aime, une chanson qui fut le prélude à dix-neuf autres. Je pouvais désormais réaliser un rêve : chanter simplement ce que je m’évertuais auparavant à enseigner, faire retentir ma voix dans toutes les autres forêts qui voulaient bien s’ouvrir à la brise de mes mots et se remplir de l’énergie qu’ils dégageaient.

La vie m’a appris… à cesser d’apprendre, et à « être ».

N’allez pas croire qu’il faille pour cela renier notre passé. Bien au contraire, il faut bénir tout ce qu’on a appris, mais ne plus s’y attacher, conscients qu’il existe toujours d’autres sommets à atteindre. Le problème, c’est que nous avons souvent tendance à stagner trop longtemps sur les mêmes paliers, croyant chaque fois avoir atteint l’ultime but. C’est peut-être d’ailleurs le piège le plus béant de tous : se croire rendu à destination. Le yoga, le reiki, la méditation, etc., c’est bien beau, mais ce ne sont que des étapes qu’il faudra transcender un jour, dépasser, pour toucher encore à plus simple, plus beau, plus agréable.

Un maître hindou me disait un jour, au terme d’une fin de semaine intensive sur l’art de méditer (une aventure riche en rebondissements que je raconte d’ailleurs en détails dans mon livre L’insoumis) : « La véritable méditation débute aussitôt que vous vous levez de votre coussin ». Cette phrase me resta dans la tête depuis, et c’est ce que je m’applique à faire encore aujourd’hui. Je ne médite plus – enfin, plus de façon traditionnelle –, je n’ai plus de rituels, et je SUIS – pas dans le sens de suivre… mais d’être!

Avancer, le sourire aux lèvres!

Les gens conscients sont avant tout des êtres de plaisir. La plus belle méditation ne consisterait-elle pas alors à faire en toute conscience des choses qui nous font vraiment du bien ? Voilà ce que la vie m’a appris : « Expérimente, puis tu sauras. Essaie toutes les voies, c’est la façon la plus rapide et la plus sûre de trouver la tienne. Quand ce sera fait, ne t’arrête surtout pas, cherches-en d’autres, encore plus larges, plus joyeuses et plus lumineuses, donc moins souffrantes… »

La vie m’a également appris à dépasser ces brins de sagesse que j’ai pu acquérir avec les années. Dans la Bhagavad-Gita (livre sacré hindou), on dit que la réalisation de soi passe par les trois gunas. Ce sont trois états à transcender avant d’arriver à la perfection. Le premier, c’est l’ignorance, le plus facile peut-être, car l’éveil passe par la connaissance. Le deuxième, c’est la passion. Lorsqu’on est mû par la passion, aucune réalisation n’est possible car on est alors sous l’emprise des émotions. Mais le troisième guna, le plus difficile de tous et l’ultime défi pour les grands spiritualistes de ce monde, c’est la vertu. Eh oui, vous avez bien lu, la vertu ! Paradoxal, n’est-ce pas ? Aussitôt qu’un être humain se croit vertueux – et peu importe si c’est vrai ou non -, il peut facilement se croire rendu au bout de la route. Puisqu’il se croit arrivé, il cesse de progresser.

C’est probablement et malheureusement le lot de bien des grands maîtres qui, quoique mus par une véritable sagesse, sont devenus immobiles dans leur vertu immuable. Ils n’écoutent plus les autres car ils croient ne plus avoir rien à apprendre. Quel leurre ! Le meilleur outil pour dépasser ce troisième guna, c’est selon moi l’humour et l’autodérision, permettant de faire des choses sérieuses… sans se prendre au sérieux. Je conclus donc cette savante chronique avant de me mettre à croire encore une fois que je vous ai dit… la vérité !

André Harvey

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